Je le tiens dans mes bras.... contre moi...
Je sens sa vie s'en aller... s'écouler lentement...
Un rapide coup d'œil à ses blessures .... je ne peux rien faire...
J'écoute ses derniers mots..... je lui souris .....ce sera fait .....mon ami...
Je me lève ...... à quelques pas Gunard est au chevet de Durack...
La neige tombe , recouvrant les corps inertes. L'excitation de la bataille passée , je frissonne , j'ai mal aux côtes. Instinctivement ma main se pose sur Cundiël, contact familier, repère au milieu de ce chaos.
Finaël s'approche et s'agenouille auprès des corps.
Alors que son chant s'élève, s'embrase en moi la flamme qui vient de s’éteindre chez mes compagnons. Elle brule,rougeoyante, nimbée de noir, emplie de colère et de haine pour l’ennemi.
Dans cette transe provoquée par la voix de mon ami je ne suis plus tout à fait là.
Je les sens autour de moi.... TOUS.
Mes amis , mes compagnons.....et grouillants derrière la grande porte, d’innombrables petites étincelles emplies de malveillance.
Je les exècre d'avoir à jamais empêché un homme de corriger ses fautes, de briser ses espoirs.
Je sens Cundiël battre à mes cotés. Je pourrais, là, maintenant, les étouffer comme on écrase la mèche d'une bougie..... les faire souffrir comme ils font souffrir ce monde... Ils doivent payer.......
Un mot traverse ce brasier.
"... Pardon..."Le dernier mot. Le seul qui vaille la peine. La colère retombe et fait place à l'espérance. Les ténèbres se dissipent et malgré ma tristesse j'entrevois l'espoir. L’Homme peut changer.
En ce jour funeste l’ennemi au lieu de m'affaiblir me renforce dans mes choix. J'en suis maintenant certain ,il ne gagnera jamais. Rien n'est écrit. Les Hommes peuvent se tromper mais ils peuvent surtout reconnaitre leurs erreurs.
Oui nous ne sommes pas immortels et sages.
Oui nous ne sommes pas tous digne de confiance et dur comme le roc.
Oui nous sommes pressés et souvent impulsifs.
Mais nous sommes capable d'apprendre, d'ouvrir les yeux et de voir ce qui nous fait défaut... de reconnaitre nos erreurs et de tout faire pour les corriger.
Nous pouvons choisir de changer.
C'est une étrange sensation que la tristesse mêlée de joie. Dans un sourire je me mets à pleurer et regarde mes compagnons un à un.
Finaël s'est éloigné.
J'entends Eodrec demander :
Y a-t-il ici de quoi rendre un hommage funèbre digne d'un nain de haute noblesse ?A ces mots Cundiel vibre à nouveau. Dans un effort je retiens une remarque cinglante car ce n'est ni le moment ni l'endroit. Il est encore jeune, il changera.
Gunard commence à s'occuper de Durack.
Alors qu'il en termine nos regards se croisent un instant. Un regard que seul des compagnons de combat peuvent comprendre.
Je hoche la tête. Il se dirige alors vers Kelnhed.
En cet instant je ne peux plus rien pour lui.
Ce n'est pas le cas pour elle.
Elle qui représente aussi l'espoir.
"Venez par ici Soeg et montrez moi votre blessure." Plus tard, comme chaque soir, monte vers le ciel, une prière en souvenir des personnes de bien.